Old friends [Elias]

T'as aucune excuse, Elias. La dernière pleine lune était déjà il y a quelques jours, tu t'es largement remis de ta soirée à gambader à poil dans la forêt avec ta troupe de louveteaux. Alors pourquoi as-tu autant la tête dans le troufion, depuis ce matin ? Ah, oui. Peut-être que si tu ne passais pas tes nuits à arpenter les rues de Blacknest, de la weed plein les poches magiques, vendant ta came aux âmes insomniaques, peut-être qu'alors tu serais de meilleure humeur le matin. Mais non, tu préfères jouer les durs et sauter une nuit de sommeil uniquement pour te faire un peu plus de thunes, alors même que tu vis avec un Auror trois jours par semaine Bravo, Elias, meilleure idée du siècle. C'est d'une humeur absolument massacrante que tu te lèves pour aller au travail après seulement trois petites heures de sommeil ; t'as une flemme incroyable, qui ne fait que redoubler quand tu te souviens qu'il faut que tu vérifies les stocks, activités très chronophage et extrêmement peu passionnante. Les joies d'être gérant d'une boutique. En plus, tu seras seul une bonne partie de la journée ; normalement, Zadig ne montrera pas le bout de son nez aujourd'hui.

Il est tôt quand tu ouvres la boutique, mais t'as toujours préféré commencer un peu plus tôt - de temps en temps, les commerces aux alentours viennent parfois se réapprovisionner chez toi à la dernière minute juste avant l'ouverture de leurs boutiques, et t'as jamais été du genre à cracher sur quelques clients en plus. Le début de journée est plutôt tranquille, ce qui veut dire que t'as deux fois plus de temps pour te faire chier comme un rat mort, et aucune excuse pour procrastiner plus longtemps le compte des stocks ; alors tu finis par descendre à la réserve, peu après la pause déjeuner, tentant de trouver quelque part en toi la motivation de passer en revue l'inventaire. Boring, boring, boring. C'est une période creuse, personne ne viendra te déranger à cette heure-ci. Personne ? C'est sans compter sur ton irréductible meilleure amie qui résiste encore et toujours à l'envahisseur- euh, au réveil. Tu marmonnes vaguement quelque chose d'incompréhensible quand tu l'entends t'appeler, puis l'appel du café est plus fort que toi ; abandonnant sans regret le stock, tu sors de la réserve pour t'approcher de Saroosh. "Coffee. God bless you," dis-tu en lui prenant la tasse des mains, inhalant la délicieuse odeur de ce nectar des dieux. Ton attention se pose à nouveau sur ton amie, et tu retiens avec difficulté un sourire amusé : "Rough night ?" demandes-tu, désignant d'un signe de la tête son apparence - on dirait qu'elle vient de sortir du lit, ce qui, la connaissant, est probablement le cas. Trempant tes lèvres dans ton café, tu te rends rapidement compte qu'il va te falloir un peu plus que de la simple caféine pour tenir la journée. Te dirigeant vers le comptoir, tu y poses ton café et te penche pour récupérer une bouteille de whisky. T'en verse une bonne quantité dans ta boisson chaude. Tu devrais probablement pas boire au boulot, mais qui va venir t'engueuler ? T'es ton propre patron. "Want some ?" demandes-tu en tendant la bouteille vers ton amie.

Elias, c’était l’une des personnes que je connaissais pas cœur dans ce monde, et c’était réciproque. Ainsi, j’avais deviné sans le moindre mal qu’il allait avoir besoin de café ce matin, parce que je me doutais qu’il s’était couché tard, pour se lever tôt. Parce que mine de rien, il avait le sens des affaires Elias. Il n’avait pas l’air comme ça, avec sa tronche défaite, mais dans le fond, c’était un bon commerçant, et bon, qui ne cracherait pas sur un peu d’argent, franchement ? Sans être quelqu’un de particulièrement vénal bien sûr. Même si moi, ma thune je la plaçais surtout dans ma réserve, donc je ne roulais pas sur l’or, je ne rechignais jamais sur de nouvelles opportunités pour gagner un peu mieux ma vie. Un peu de trafic dans l’ombre des fois, ça mettait du beurre dans les épinards. Fort heureusement, je ne faisais pas de commerce illégal en ce qui concernait les dragons. Ça, je le combattais même ! Je ne supportais pas l’injustice.
Bref, malgré nos conditions de personnes un peu paumées dans la vie, d’être un peu hors normes, Elias et moi, on aimait bosser, et malgré notre fatigue, on aimait ce qu’on faisait.
Alors, avec un sourire entendu et un clin d’œil, je répondais à sa remarque tandis qu’il buvait directement son café. Profitant de cet instant, je découvrais mes cheveux en me découvrant de ma capuche, révélant mes mèches roses. Ce n’était pas rare que j’en fasse de cette couleur, même si ça pouvait surprendre quand on me connaissait mal. Le rose ne semblait pas être une couleur qui m’allait. Pourtant, ça me donnait un côté un peu coquet plutôt inattendu, et j’aimais ça.
Déambulant dans la boutique, je regardais les divers objets avec un regard un peu perdu et songeur. Néanmoins, je hochais lentement du menton avant de répondre d’une voix lente.

- Yes, lot of work… Lui jetant une œillade complice, je rétorquais. You too ?

Je connaissais ses activités nocturnes, et je n’étais pas contre, après tout, je faisais souvent pareil. Seulement, Elias savait qu’il pouvait compter sur moi pour le protéger. C’était mon rôle depuis des années après tout. L’une des rares personnes qui pouvait se dresser contre lui sans sourciller. A dire vrai, je me dressais devant presque tout le monde sans sourciller. Je n’avais pas trop se recul de la peur, de craindre de me faire péter la gueule. C’était pour ça que j’étais couverte de cicatrices moi aussi, même si elles étaient plus fines et discrètes que celles de mon ami de toujours.
Lorsqu’il me désigna la bouteille d’alcool, je laissais une exclamation de soulagement s’échapper de mes lèvres avant de le rejoindre à grands pas jusqu’au comptoir, lui tendant ma propre tasse de café.

- Oh fuck, sure ! You are the best, you know ?

Je n’étais pas alcoolique, mais, j’aimais boire et surtout, j’adorais le whisky. Elias le savait bien, et il savait aussi que c’était difficile pour moi de refuser un verre, surtout lorsqu’il était mélangé au café. Ça pouvait être un goût étrange pour les novices, pour moi, c’était l’un des meilleurs nectars du monde. Trempant les lèvres dans mon petit cocktail matinal une fois que mon frère de cœur m’ait servi, je détournais à nouveau mon regard dans la boutique en gardant un petit instant de silence avant de reprendre, le ton détaché, mais l’air concerné.

- Do you heard about the rumors ? murders and the shit at MACUSA

Matinée calme, tu n'as eu qu'à faire les stocks ; dans l'après-midi, certains établissements à proximité viendront se ravitailler en herbes et autres ingrédients, tandis que les habituels curieux viendront jeter un oeil aux divers objets magiques et artefacts ensorcelés mis en vente. Mais pour l'instant, tu profites de ton temps avec Saroosh, meilleure amie de toujours. Tu n'es pas étonné quand elle confirme qu'elle a passé la nuit à bosser : passionnée par son travail, elle n'a jamais été du genre à faire une pause ou à reporter le travail au lendemain, surtout lorsqu'elle est déjà la tête dedans. Elle te retourne la question, une lueur complice dans le regard, et tu sais déjà qu'elle se doute que tu as passé la nuit à gambader dans le vieux quartier. Difficile de lui cacher quoi que ce soit, elle te connait trop bien - tellement d'années d'amitié, une relation si précieuse pour toi qui n'a pas eu la chance d'avoir de famille. Alors ta famille, c'est elle, et le reste de la meute. Et tu n'es pas du genre à cacher grand chose à celle que tu considères comme ta soeur. "Yeah. Had to make a few deliveries around the town. Took Cerberus with me for a walk too." Le gros chien noir te tient compagnie pendant tes nuits de vadrouille, et éloigne aussi les âmes mal intentionnées - le clébard a une gueule énorme, des griffes asserrées, et l'air peu commode. Bon en réalité, Cerbère est une grosse peluche adorable et fan de câlin, mais ça les autres n'ont pas besoin de le savoir.

Tu réalises rapidement que tu vas avoir besoin d'un peu plus qu'un simple café pour te remettre de ta longue nuit d'errance ; il te faut un petit remontant, un petit bonus, quelque chose d'agréable et motivant - comme de l'alcool, par exemple, et ça tombe bien parce que tu gardes toujours sous le comptoir, bien caché de la vue des clients, une bonne bouteille de whisky comme on les aime. Tu t'en verses une bonne lampée, de quoi bien sentir le goût même à travers le café, et en proposes à Saroosh, qui n'hésite pas une seule seconde, ravie de la proposition. Tu souris, réponds simplement "I know," un sourire ironique aux lèvres. Tu la sers, en mettant pile poil la quantité qu'elle aime, avant de prendre une gorgée directement à la bouteille ; puis tu la remets à sa place sous le comptoir, et tu t'empares à nouveau de ta propre tasse, sirotant doucement ce nectar des dieux. Il n'y a rien de meilleur que ça ; café, whisky, heure creuse et meilleure amie. Mais rapidement la discussion prend un ton un peu plus sérieux : Saroosh lui demande si elle a entendu parler de tout ce qu'il se passe actuellement, entre le meurtre dans le quartier et le bordel au MACUSA. Tu hoches sombrement la tête ; depuis que tu as entendu parler de cette affaire, tu réfléchis, tournes et retournes la situation dans ta tête. Pour toi, le plus important, c'est la sécurité de la meute, et cette sécurité se voit mise en danger par ces activités étranges au vieux quartier. "The situation at the MACUSA might be helpful - they're on strike, they won't be focused on us for a while, so that's good..." Mais il y a un autre problème. "But I'm worried for our safety in the Old Town. Gotta be more careful... I also hope that the Major Investigation Service won't be looking into gangs and groups. I'm pretty sure our own group will look suspicious to them." Même si le groupe en lui-même est inoffensif, il y a des orphelins, des gens élevés dans le vieux quartier, et des activités nocturnes pas toujours très légales.